La porcelaine du dimanche (English version below)
On ne les sortait que le dimanche et les jours de fête, lorsque nous avions des invités. Ma grand-mère les appelait « les petites tasses blanches ». Retour sur la porcelaine de Vierzon. Par Garance.
La vaisselle du dimanche
D’aussi loin que je puisse me souvenir, lorsque ma grand-mère recevait pour le déjeuner du dimanche ou une autre fête religieuse, elle sortait ce service à café après le dessert. A cette époque, le dimanche était un jour spécial. Nous revêtions des vêtements plus jolis ou plus neufs que les autres jours. Ma mère et ma grand-mère avaient lavé leurs cheveux et fait leur mise en plis la veille pour être sur leur 31 dès le dimanche matin. Messe, poulet au four, tarte aux pommes… et puis le café dans les « petites tasses blanches », comme les appelaient ma grand-mère.
La porcelaine de Vierzon
Au début du XXe siècle, 14 manufactures font travailler 1 500 ouvriers à Vierzon (Berry, France). L’environnement naturel est favorable à la fabrication de la porcelaine : bois, argile… et à partir de 1847, les voies ferroviaires et fluviales favorisent les échanges marchands (approvisionnement en charbon, transport des produits manufacturés). Parmi ces 14 manufactures, la manufacture Taillemite, créée en 1875 et spécialisée dans la porcelaine d’hôtellerie.
La Compagnie nationale de porcelaine (CNP)
Entre 1952 et 1970, 13 unités de production disparaissent. Un regroupement s’organise autour des établissements Taillemite dirigés par Roger Taillemite, également président de la chambre syndicale des fabricants de porcelaine du Berry et vice-président du syndicat national de la porcelaine française. Un partenariat de crée avec l’usine de Saint Genou et la manufacture Jacquin de Vierzon. Ainsi est créée la Compagnie nationale de porcelaine.
Diversification, modernisation
Roger Taillemite transforme l’entreprise, la modernise et poursuit une politique de diversification. L’hôtellerie continue de représenter 50% du chiffre d’affaires mais l’entreprise se met à créer de nouveaux décors, dont un service « chasse » qui remporte un franc succès.
Un nouveau rapprochement en 1969 avec l’Union Limousine, qui fabrique des services de table haut de gamme à St Léonard de Noblat, permet d’obtenir l’estampille « Limoges ».
Lente agonie
Les années qui suivent marquent le déclin de la CNP. La société dépose le bilan en 1983. Elle est reprise, modernisée, restructurée une nouvelle fois. Elle survit encore une quinzaine d’années avant l’arrêt définitif de la production en 1997.
Le service à café du dimanche
De cette époque où l’on dressait la table avec une vaisselle spéciale pour les repas du dimanche et des fêtes religieuses, il ne reste que ces quelques petites tasses blanches décorées de voitures tirées par des chevaux. Je les ai trouvées endormies au fond d’un placard, dans la maison de ma grand-mère. Elles n’ont plus servi depuis plusieurs décennies. Chaque tasse avec sa sous-tasse propose un décor différent. Enfant, cela suffisait à mettre en route un film en technicolor mental auquel mon imagination s’adonnerait au moment de servir le café. Et j’aurais le droit de tremper un sucre dans la tasse de ma grand-mère, assise sur ses genoux.
English version
The porcelain of Sunday
We only went out on Sundays and holidays when we had guests. My grandmother called them "the little white cups." Back on the porcelain of Vierzon.
Sunday's dishes
From as far back as I can remember, when my grandmother received for Sunday lunch or another religious holiday, she would take out this coffee service after dessert. At that time, Sunday was a special day. We put on prettier or newer clothes than on other days. My mother and grandmother had washed their hair and made their styling the night before to be perfect on Sunday morning. Mass, baked chicken, apple pie ... and then coffee in the "little white cups," as my grandmother called them.
The porcelain of Vierzon
At the beginning of the twentieth century, 14 factories employed 1,500 workers in Vierzon (Berry, France). The natural environment is favorable to the manufacture of porcelain: wood, clay ... and from 1847, the railway and river routes favor trade (supply of coal, transport of manufactured products). Among these 14 factories, the Taillemite factory, founded in 1875, specializes in hotel porcelain.
The « Compagnie Nationale de Porcelaine » (CNP)
Between 1952 and 1970, 13 production units disappeared. A grouping is organized around Taillemite establishments run by Roger Taillemite, also president of the Berry porcelain manufacturers' union and vice-president of the national union of French porcelain. A partnership of creations with the factory of Saint Genou and the manufacture Jacquin de Vierzon. The « Compagnie Nationale de Porcelaine » (National Porcelain Company) was created.
Diversification, modernization
Roger Taillemite is transforming the company, modernizing it and pursuing a policy of diversification. Dishes for hotels and restaurants continue to represent 50% of the turnover, but the company is starting to create new decorations, including a successful hunting service.
A new rapprochement in 1969 with the Union Limousine, which manufactures high-end table services in St Léonard de Noblat, makes it possible to obtain the "Limoges" stamp.
Slow agony
The years that followed marked the decline of the CNP. The company filed for bankruptcy in 1983. It was taken over, modernized and restructured again. It survives another 15 years before the final shutdown of production in 1997.
Sunday coffee service
From that time when the table was set up with special dishes for Sunday meals and religious festivals, there are only a few little white cups decorated with horses-drawn carriages. I found them sleeping at the bottom of a closet, in my grandmother's house. They have not been used for several decades. Each cup with its sub-cup offers a different decor. As a child, it was enough to set in motion a film in mental technicolor to which my imagination would indulge when serving coffee. And I would have the right to soak a sugar in my grandmother's cup, sitting on her lap.
Sources : sources : Deux siècles de porcelaine en Berry, Poitou et Bourbonnais de Michel Bloit et http://webmuseo.com/